Châteaux de France inscrits et classés au titre des Monuments Historiques

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Château de Coucy

Malgré son état de ruines, le château de Coucy inspire, à première vue, un sentiment presque respectueux. L'imagination humaine se trouve dépassée on ne croyait pas voir si grand. Et, lorsqu'on cherche à se familiariser avec cette forteresse colossale, on arrive bientôt à voir que l'harmonie des proportions contribue presqu'autant que les dimensions à donner à Coucy son aspect terrifiant et grandiose. Bâti sur une éminence isolée de trois côtés et qui domine de quatre-vingt-dix mètres les plaines environnantes, le château de Coucy se compose de quatre énormes tours reliées ensemble par des courtines. Au centre de ce quadrilatère s'élève une cinquième tour beaucoup plus haute que les autres et dont la galerie supérieure, maintenant à jour, devait porter toute une armature de hourds en bois, abritant, contre les assaillants, des guerriers invisibles. Tout est colossal dans ce château, écrit M. Eugène Viollet-le-Duc dans son rapport fait au gouvernement au sujet de la restauration des ruines. Quoique exécutée avec grand soin, la construction a quelque chose de rude et de sauvage qui rapetisse l'homme de notre temps. Il semble que les habitants de cette demeure devaient appartenir il une race de géants, car tout ce qui tient l'usage habituel est une échelle supérieure à celle admise aujourd'hui: les marches des escaliers, les allèges des créneaux, les bancs sont faits pour des hommes au-dessus de l'ordinaire. Pour bien faire apprécier la force de cette redoutable citadelle, M. Viollet-le-Duc nous expose encore la série d'efforts qu'aurait exigé un siège en règle L'assiégeant devait franchir la première porte et son pont-levis, traverser un chemin sous les projectiles lancés de la partie supérieure de la chemise et du crénelage, forcer deux vanteaux et affronter un mâchicoulis. Il se trouvait alors en face de la herse donnant sur le fond du fossé de la chemise, ayant h sa gauche la porte ferrée qui fermait le bas de l'escalier de la cuisine, et arrêté dans la galerie inférieure par une source qui est un véritable puits dans un souterrain obscur. S'il forçait la herse, il pénétrait dans le fond du fossé intérieur, lequel est dallé et sans communication avec le sol de la cour battu par les défenses supérieures du donjon, qui lui envoyaient des projectiles d'une hauteur de 60 mètres, et par le chemin de ronde de la courtine, il était perdu, d'autant que les hommes occupant ce chemin de ronde pouvaient descendre par l'escalier, passer dans la galerie de contre-mine, traverser la source sur une planche et lui couper la retraite en reprenant la poterne derrière lui. Pour pénétrer dans le château, on y venait du village par une baille ou basse-cour où se trouvaient une chapelle roman et le logement du châtelain, le tout ruiné maintenant. Quand on avait traversé la cour protégée par le donjon, il fallait s'engager sur un pont soutenu par cinq piliers et que cinq portes défendaient successivement. L'histoire des sires de Coucy, elle aussi, est bien extraordinaire on dirait une histoire des temps héroïques. En 496, Clovis, devenu maître, par droit de conquête, de la forêt de Cuise (Sylva Cotia, d'où est venu le nom de Coucy), donna cette terre à saint Remy, en souvenir de son baptême. A la mort du saint archevêque, l'église de Reims hérita du petit domaine royal et le conserva en paix jusqu'au commencement du Xe siècle. Vers l'an 1079, un de Coucy. Thomas de Marie et Enguerrand II, ses successeurs faisaient la chasse aux riches voyageurs, qu'ils dépouillaient et tuaient sans merci. Enguerrand II mourut en Terre-Sainte. Raoul 1er, fils d'Enguerrand II, reçut le premier le titre de sire de Coucy, avec cette fière devise "Roy ne suis, ne prince, ne comte aussy, je suis le sire de Coucy". Comme son père, il partit pour la Terre Sainte et ne revint plus. Enguerrand III, dit le Bâtisseur, succéda à Raoul, son père, en 1191. La grande préoccupation de ce seigneur fut de travailler à étendre au loin sa domination. A cette fin, il éleva, de 1225 à 1230, le formidable château et la ceinture de fortifications dont nous voyons encore les ruines aujourd'hui. Il est à remarquer que cet illustre sire faisait élever, en même temps, les châteaux-forts d'Assis-sur-Serre, de Folembray, de La Fère, de Marie, de Moyembrie, de Saint-Aubin, de Saint-Gobain et de Saint-Lambert. De toutes ces constructions gigantesques, il ne reste plus guère que les ruines de Coucy, dont la masse indestructible a fatigué le temps. Nous n'essayerons pas de dire ce qu'il a fallu dépenser, simultanément et en tant d'endroits, d'intelligence, de goût, d'activité et de richesses pécuniaires, pour suffire des entreprises si vite menées à bonne fin, nous ne rechercherons pas par quels moyens la main-d'œuvre se trouva assez puissante pour couvrir aussi rapidement le sol de notre contrée de ces merveilles architecturales, mais nous ne pouvons nous lasser d'admirer les ressources, la force Enguerrand s'empara du château, s'engageant à payer, chaque année, une certaine redevance à l'église de Reims. C'était un bien vaillant guerrier que le nouveau maître d'un génie que ces gigantesques créations étaient loin d'affaiblir. Enguerrand ne se lassait pas de construire parce qu'il ne se lassait pas de s'enrichir; sa politique venait en aide à ses besoins, et son caractère aussi ambitieux qu'impérieux ne lui laissait perdre aucune occasion de tenter la fortune et de lui arracher ce qu'elle ne pouvait lui offrir. Ajoutons qu'il fut singulièrement aidé par les circonstances. Il semble d'ailleurs que la France de Hugues Capet se dépouillait de son manteau suranné pour revêtir de nouveaux atours. La France de Philippe-Auguste se levait radieuse au lendemain de Bouvines, et partout sous ses yeux apparaissait de nouveaux édifices. Raoul II et Enguerrand IV héritèrent successivement du domaine de Coucy, le premier mourut glorieusement en Palestine sur le champ de bataille de Mansourah, le second s'éteignit tristement dans son manoir, "honteux et repentant d'avoir fait pendre méchamment trois jeunes enfants de l'école monastique de Saint-Nicolas-aux-Bois, qui s'amusaient à chasser sur ses terres, de timides lapine, avec flèches, arcs et sans chiens". On sait que saint Louis fit imiter le beau sire et ne lui conserva la vie qu'à la prière des hauts barons du royaume et à de très dures conditions. Enguerrand V vécut en solitaire dans son château et fut enterré dans l'abbaye de Prémontré. Enguerrand VI, Enguerrand VII et dernier, furent deux chevaliers sans peur et sans reproche. Nous les trouvions toujours au premier rang, combattant pour la France et pour le Roy, contre les Anglais envahisseurs du sol, contre les insurgés de la Jacquerie et contre les infidèles. Enguerrand VII mourut le 20 février 1397, ne laissant d'autre héritière que sa fille, Marie de Coucy. Le domaine de Coucy passa au pouvoir du duc d'Orléans, qui l'extorqua, à prix d'argent, à l'infortunée fille du dernier sire de Coucy. En 1498, le roi Louis XII le réunit à la Couronne. Ainsi finit cette maison de Coucy qui disait, en parlant de ses soldats Si le ciel tombait, ils le soutiendraient sur le fer de leurs lances. Carle Ledhuy, en son Histoire romantique de Coucy, fait remarquer qu'à la mort de Raoul 1er, trois branches de cette famille s'étaient formées: la branche de Coucy proprement dite; celle de Vervins et celle de Pinon. Cette dernière, dit-il, s'est éteinte dès la troisième génération. Quant à la branche de Vervins, plus heureuse que les autres, elle s'est perpétué jusqu'au début du XIXe siècle. En 1817, le siège archiépiscopal de Reims était occupé par un Coucy-Vervins du nom de Jean Charles, comte de Coucy, né au château d'Escordal eu Champagne et mort à Reims le 11 mars 1821. Il avait quinze frères et sœurs. De nos jours, le nom de Coucy s'est uni à nos gloires les plus pures: une femme qui résume en elle seule toutes les grâces et les vertus des anciennes dames de Coucy, Madame la maréchal duchesse de Reggio, se nomme Eugénie de Coucy. Démantelé en 1652, le château des Enguenand fut abandonné et l'on vit, pendant près de deux siècles les habitants de Coucy venir chercher, comme dans une carrière publique, les plus belles pierres du vieux manoir. En 1839, Louis-Philippe d'Orléans acheta les ruines, et le vandalisme fut enfin réprimé. Les tours de Coucy, dit Eugène Viollet-le-Duc, présentent deux étages de cave et trois étages de salle au dessus du sol, sans compter l'étage des combles. Elles sont saillantes sur les courtines, de manière à les bien flanquer, elles n'ont pas moins de 18 mètres de diamètre hors œuvre, sur 35 mètres environ au-dessus du sol extérieur. Les escaliers à vis ne montent pas de fond, mais s'interrompent à partir du premier étage, pour reprendre de l'autre côté de l'entrée de la tour; c'était un moyen d'éviter les trahisons, en forçant les personnes qui voulaient monter sur les parapets de passer par l'une des salles. Quant il leur distribution intérieure, le savant architecte la décrit ainsi: "Chaque chambre, à partir du rez-de-chaussée, se compose à l'intérieur de six pans, avec niches, dont quelques-unes sont percées en meurtrières. Ces pièces sont voûtées, et les niches se chevauchent à chaque étage, les pleins étant au-dessus des vides et vice versa, ce qui était fait pour voir tous les points du dehors et surtout pour éviter les lézardes verticales qui se produisent dans ces sortes de constructions, lorsque les vides sont tous au-dessus les uns des autres. Des cheminées sont pratiquées dans les salles". La grande tour a 55 mètres de haut sur 30 mètres de large; les murs, à la base, ont plus de 7 mètres d'épaisseur; sur le fronton, au-dessus de la porte d'entrée, bas-relief représentant le lion légendaire bravement attaqué par Enguerrand. A l'intérieur, dans la salle du rez-de-chaussée, on voit la haute cheminée des sires de Coucy et un puits. Montons au sommet de la tour. L'escalier se trouve près de la porte d'entrée, il a deux cent vingt marches et conduit aux trois étages, formant trois salles superposées avec galeries et voûtes à nervures. Le premier et le second étages ont à peu prés les mêmes proportions et les mêmes dispositions que le rez-de-chaussée le troisième étage est à ciel ouvert et entouré d'un parapet ajouré de vingt-quatre fenêtres. Les trois étages étaient couverts de belles voûtes à douze nervures qui ont été détruites. Un chemin de ronde, pris dans l'épaisseur des murs, permettait de faire le tour de la salle du deuxième étage sans y entrer. Au centre de chaque voûte était percée un large orifice circulaire par lequel on pouvait monter ou descendre rapidement, d'une salle à l'autre, des hommes et des munitions. La plate-forme qui couvrait l'étage supérieur, est aujourd'hui remplacée par un toit au niveau de cette plate-forme, à l'extérieur, des corbeaux supportaient, en cas de besoin, des hourds. Un parapet fort élevé, percé de 24 créneaux en ogive et d'autant de meurtrières, est encore couronné, à l'intérieur et à l'extérieur, d'une épaisse corniche à deux rangs de feuilles entablées. Il y avait là-haut, du temps des Enguerrand un vivier alimenté par les eaux pluviales et bien fourni de poissons Encore vingt marches et l'on touche le sommet du donjon. Le mur a trois mètres d'épaisseur: on ne peut plus s'y promener, c'est trop dangereux. Du haut de cette tour, vue magnifique; au pied de la montagne, le clocher pyramidal de Coucy-la-Ville dans le lointain, les cheminées de Folembray et de Chauny; la collégiale de Saint-Quentin; la cathédrale de Noyon et les montagnes du Laonnois. Remarquons, avant de descendre, la position critique, épouvantable de ces malheureux que la justice implacable des sires de Coucy condamnait à se jeter du haut de cette tour. 

Éléments protégés MH: les ruines du château en totalité : classement par liste de 1862. 

 château fort de Coucy 02380 Coucy-le-Château-Auffrique 

Téléphone : 03 23 52 71 28 

 

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