Châteaux de France inscrits et classés au titre des Monuments Historiques

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Château de Château-Thierry

L'opinion la plus générale est que le Château qui domine Château-Thierry fut construit vers l'an 720, par Karl-Martel ou plutôt Marteau, comme l'appelaient ses compagnons d'armes, pour le fantôme de roi Theodorik IV. Karl possédait déjà dans la contrée, sur la montagne des Chesneaux, une métairie et une maison de plaisance. On y voit encore une cour qui a conservé le nom de cour de Mont-Martel, et qui n'est autre que l'emplacement de la métairie dont les derniers vestiges disparurent en 1789; ils consistaient en une porte et une tour dans laquelle les religieux de Val-Secret rendaient la justice. Quant à la maison de plaisance elle était située un peu plus bas, et de l'autre côté de la rue. Le Château à peine construit, les populations continuellement inquiétées dans ces temps de guerres civiles, s'empressèrent de venir s'établir autour d'une forteresse qui pouvait les protéger contre les attaques réitérées des bandes armées. C'est du reste l'origine de toutes les villes qui eurent pour berceau un château-fort. Cependant tout nous porte à croire que bien avant la fondation du Château, il existait sur les collines environnantes des habitations en assez grand nombre pour former non un oppide mais un vicus, et que la véritable origine de Château-Thierry est gallo-romaine. Du reste, il y a quelques années, on voyait encore dans la prairie qui est traversée aujourd'hui par le chemin de fer, les vestiges d'une chaussée romaine et le Peuple-Roi avait déjà jeté un pont sur la Marne dès le règne de Néron et de Vespasien. La ville naissante reçut le nom de son royal seigneur; ou trouve dans les anciennes chartes Castrum Thcodorici, Castellum Teuderici. Robert Gaguin la nomme Castrum Thierricum; et Duhaillan Theoderici Castrum. Le Château fut souvent habité par les rois de la seconde race et jusqu'au règne de Charles le Simple, nous ne voyons aucun événement remarquable à signaler dans l'histoire de Château-Thierry. A cette époque, les Normands commençaient à désoler la France, et déjà le comte Heribert 1er de Vermandois qui avait su réunir à ses domaines le comté de Château-Thierry, avait été forcé de les chasser à plusieurs reprises de ses Etats, lorsqu'il fut assassiné par ordre de Beaudoin, comte de Flandre. Son fils Heribert II lui succéda, mais plus ambitieux et plus astucieux que son père, il abandonna le parti du roi pour embrasser celui de ses ennemis, et bientôt le malheureux Charles, battu par Hugues-le Grand, sur les bords de l'Aisne, fut forcé de s'enfuir en Lorraine et se vit détrôné par le beau-frère de son vainqueur, Raoul duc de Bourgogne. Heribert qui voulait se faire bien voir du nouveau roi, attira chez lui Charles le Simple, et au bout de quelques jours il le faisait conduire à Château-Thierry (923). Charles était depuis quatre ans dans cette forteresse, quand Heribert vînt lui apprendre sa délivrance. En effet, le comte de Yermandois, mécontent du refus du comté de Laon qu'il avait demandé, avait résolu d'en tirer vengeance en faisant acclamer son prisonnier; mais Raoul voyant la faute qu'il avait commise, fit offrir le comté de Laon à Heribert qui s'empressa de réintégrer le pauvre roi détrôné dans sa prison de Château-Thierry. Une des tours étant venue à brûler, il fut conduit à Reims et de là à Péronne où il mourut. Nous ne pensons pas qu'Heribert ait poussé la cruauté jusqu'à renfermer Charles dans une tour; cependant on montre encore une grosse tour qui forme l'angle du Château du côté de la ville et qu'on appelle Tour du roi Thierry; il est certain que jamais Théodorik IV n'a été enfermé, puisqu'il était au contraire traité avec beaucoup d'égards par Karl-Martel qui du reste gouvernait en son nom; il n'y a pas le moindre doute à cet égard. Mais en général, il faut faire la part des légendes populaires qui, si elles ne sont pas toujours exactes dans les détails, s'appuient toujours aussi sur un fond de vérité. Nous croyons donc que la tour de Thierry, que quelques-uns appellent aussi prison du roi, n'est autre que la prison de Charles le Simple, si toutefois ce malheureux prince a jamais été si rigoureusement traité, ou mieux encore, la prison indispensable à tout château-fort. C'est sous le règne d'Heribert que la chapelle du Château reçut les reliques de Saint-Cénéric, dont les religieux fuyaient les brigandages des Normands; et depuis ce temps elles ont toujours été en grande vénération à Château Thierry, qui regarde ce saint comme son patron tutélaire. Château-Thierry eut à subir plusieurs sièges, tant de la part du roi Raoul qui, après la mort de Charles le Simple, voulait se venger des trahisons sans cesse renouvelées du comte de Vermandois, que de celle de ce dernier qui faisait tous ses efforts pour rentrer dans ses États. Le premier, qui était dirigé par la reine Emma, en l'absence de son mari, dura six semaines, au bout desquelles le gouverneur, nommé Walon, capitula honteusement avec la reine. Heribert parvint à rentrer par surprise à Château-Thierry qui fut de nouveau assiégée par Raoul et ne se rendit qu'au bout de quatre mois. Heribert fut donc obligé de capituler, mais à peine l'ennemi était-il parti, qu'il refusa d'exécuter les conditions de la capitulation. Raoul revint donc une troisième fois, la paix ne fut définitivement conclue qu'en 934 et Château-Thierry fut une des villes que le comte de Vermandois fut obligé d'abandonner. Raoul étant venu à mourir au bout de deux ans, Heribert profita des troubles occasionnés par cette mort, pour rentrer à Château-Thierry dont les portes lui furent ouvertes par ce même Walon qui l'avait déjà trahi. Inutile d'ajouter que le premier soin du comte fut de faire jeter le traître dans un cachot où il mourut de faim. Le comté de Château-Thierry resta jusqu'en 945 dans les mains de la famille d'Heribert; à cette époque, il devint la propriété de Richard comte de Troyes qui paraît l'avoir vendu ou donné en fief à un nommé Thierry. La durée du règne de Thierry et de ses enfants, fut une ère de bonheur et de prospérité pour le pays, Thierry s'empressa de réparer la forteresse qui changea presque complètement de physionomie. Les enfants de Thierry succédèrent à leur père et purent continuer assez paisiblement son œuvre; d'un autre côté ils avaient également su se concilier les bonnes grâces des comtes de Champagne, leurs suzerains, qui paraissent s'être réservé des biens dans la seigneurie de Château-Thierry. Hugues, fut le dernier seigneur feudataire de Château Thierry; c'était un homme d'une naissance très illustre qui tenait un rang distingué dans l'État. D'autres le croient parent des comtes de Champagne, et les Chartes l'appellent Dignasta, seigneur d'un grand pouvoir; il agrandit le château, et construisit la porte d'entrée dont on voit encore les restes; c'est un des beaux morceaux d'architecture militaire du XIe siècle. A cette époque, le château n'avait pas l'étendue qu'il a aujourd'hui; il y avait entre la première enceinte et la porte actuelle, un espace vide qu'on appelait le Mont-Blanc. Hugues l'entoura de murs flanqués de tours et de bastions; dès lors cette forteresse fut regardée comme une des plus dures de France. Hugues mourut en 1070; Château-Thierry passa sous l'autorité immédiate des comtes de Champagne, qui surent se faire aimer et respecter; mais le plus illustre de tous, et celui qui affectionna le plus Château-Thierry est sans contredit Thibault II, surnommé le Grand. Ce prince fit construire sur le Château à l'entrée du second fort, derrière l'église, une chapelle qui fut dédiée à Thibault, il fit amener l'eau sur le sommet du château qui se trouva posséder, outre un puits très profond et une citerne, deux jets d'eau, un abreuvoir et un canal séparant les deux forts. Thibault ne borna pas ses travaux à son château, il fit reculer le lit de la rivière, construisit un fort près du pont, entoura la ville de murs, et jeta les fondements de la porte Saint-Pierre qui était une des principales entrées de la ville. Les successeurs de Thibault le Grand continuèrent les œuvres de ce prince, laissant dans le pays des traces de leurs bienfaits dont le souvenir n'est pas encore effacé. Nous citerons, entre autres: la fondation de la Maison-Dieu de la Barre, en 1210, par Blanche de Navarre, épouse de Thibault II; la Charte de commune donnée à Château-Thierry par le comte Thibault IV en 1231, et l'agrandissement de l'église Notre-Dame du château qui datait du VIIIe siècle, par Blanche d'Artois, comtesse de Champagne et reine de Navarre en 1276. C'est à cette princesse dont le nom est resté si populaire, que Château-Thierry doit une partie de ce qui a contribué à sa prospérité. Elle institua la Basoche à qui elle accorda divers privilèges. Avec la reine Blanche finit la dynastie des comtes de Champagne, sa fille Jeanne ayant épousé Philippe le Bel; le comté de Château-Thierry rentra dans le domaine de la Couronne. Nous ne voyons rien de remarquable à enregistrer dans l'espace de temps qui s'écoula depuis la mort de Jeanne en 1304, jusqu'à l'époque où la plus grande partie de la France devint la proie des Anglais. Le Comté de Château-Thierryfut donné en apanage à Louis d'Orléans, en 1400, et vingt ans après, malgré l'héroïque défense du brave Lahire, le château qui avait déjà beaucoup souffert de la Jacquerie et pendant les luttes intestines entre les Armagnacs et les Bourguignons, tomba au pouvoir des Anglais. Ils n'en furent chassés qu'en 1429, par Jeanne d'Arc. Par le traité de Péronne, Louis XI en assura la possession au duc de Berry, son frère, mais à la mort de ce prince il le céda au connétable de Saint-Pol en échange de l'île de Ré (1473); puis quand le connétable eut été décapité, il le donna au Bâtard de Bourgogne (1478). Enfin, Louis XII rentra dans sa possession en 1502. François 1er établit à Château-Thierry deux foires par année pour la vente des cuirs et des étoffes différentes, et fit construire un nouveau pont sur la Marne, pour remplacer celui des romains qui tombait en ruines. En 1526, Château-Thierry passa dans le domaine des ducs de Bouillon. Charles-Quint entra par capitulation à Château-Thierry en 1544, elle n'en fut pas moins pillée et ravagée malgré la foi jurée. Sept ans après, Henri II l'érigea en présidial. En 1566, Charles IX la constitua en duché-pairie pour son frère le duc d'Alençon; ce prince y mourut en 1584. Pendant les guerres de la ligue, Henri IV confia la défense du château au nommé Lanoue qui défit les ligueurs dans plusieurs sorties; malheureusement, Henri IV eut la maladresse de le remplacer par un sieur de Pinard, et à peine était-il installé qu'il livrait la ville au duc de Mayenne, en 1591. Le duc y laissa une forte garnison sous le commandement de Saint Chamans. En 1593, celui-ci remit Château-Thierry à Henri IV, qui le maintint dans son poste et rendit aux habitants tous les privilèges dont ils avaient été dépouillés. Pendant la minorité de Louis XIII, les princes assiégèrent Château-Thierry et s'en emparèrent (1614); deux ans après elle rentrait sous l'autorité royale et devint alors l'apanage de François d'Orléans comte de Saint-Pol, qui la combla de bienfaits. A sa mort (1631), le roi reprit possession du duché et vint souvent habiter le château avec Anne d'Autriche et Richelieu. En 1650, lors de la première invasion des Lorrains, Château-Thierry fut préservée de leurs attaques, grâce à l'attitude énergique du prieur du monastère de Coincy, Jacques Bataille qui, ayant armé ses moines, tint tête à douze cents Lorrains qui l'assiégeaient dans son abbaye et les contraigne à se retirer. La ville eut moins de bonheur en 1652, Charles de Lorraine put y pénétrer et ses soldats exercèrent les plus grandes cruautés sur les habitants. En 1652, Louis XIV échangea les terres d'Albret et de Château-Thierry contre la principauté de Sedan, la maison de Bouillon rentra donc en possession du duché et le conserva jusqu'à la Révolution. Les fortifications du château furent rasées en 1700, et le dernier hôte illustre que reçurent ces vieilles murailles fut Marie de Mancini, qui bannie dans ses terres, vint passer son exil à Château-Thierry. Ce fut à cette époque qu'une aventure scandaleuse amena la suppression de l'abbaye de la Barre renversée de fond en comble en 1745. L'effervescence des passions politiques pendant la Révolution se manifesta à Château-Thierry, et bientôt elle fut obligée de supprimer son nom pour prendre celui de Egalité sur Marne. Sous l'Empire, la ville eut plusieurs fois l'honneur de recevoir Napoléon dans ses murs, et en 1811, sa position stratégique en fit un des centres les plus importants des opérations militaires. Les généraux Blucher, York et Saken, s'en emparèrent le 9 février et après la victoire de Montmirail, les troupes coalisées s'y concentrèrent. Elles furent bientôt obligées d'évacuer la ville où elles avaient commis les plus grands excès; ils y rentrèrent le 24 et la mirent de nouveau au pillage, mais le 8 mars l'apparition de l'Empereur jeta l'épouvante parmi eux et ils s'enfuirent en désordre. La garnison française fut forcée d'abandonner la ville, le 22 mars, l'ennemi y rentra et se porta de nouveau à toutes sortes de violences. Le retour de la paix vint mettre un terme à toutes ces souffrances. Les armes de Château-Thierry sont d'azur à un château composé de cinq tours d'argent, pavillonnées et girouettées de même, posées en fasce, accompagnées de trois fleurs de lys d'or, posées deux en chef et une en pointe; l'écu entouré de deux branches de houx et surmonté de la devise, Nul ne s'y Frotte. La première entrée du château était la porte Saint-Pierre, composée de deux tours massives et d'une ogive surmontée d'un blason; elle était garnie d'un pont-levis et de herses, une muraille terminée à l'angle par une tour venait de chaque côté rattacher à cette porte et la protéger. Au-delà se trouve la première enceinte bâtie par Hugues au XIe siècle. Rien de plus majestueux que son entrée flanquée de tours anguleuses et bosselées, sa voûte tortueuse qui était précédée d'une arcade ogivale dont il ne reste plus que les piliers. Si nous pénétrons à l'intérieur, l'aspect est saisissant et la vue de ces vieilles murailles que le temps semble vouloir protéger de son manteau, de ces salles voûtées qui se présentent dans toute leur simplicité sévère et grandiose, inspire aux visiteurs un respect dont il est impossible de se défendre. A droite et à gauche, on voit une salle éclairée par des meurtrières et où se trouve un escalier qui conduit aux étages supérieurs composés de couloirs et de salles voûtées, garnies de leurs cheminées. Il n'en reste plus qu'une fort bien conservée, l'autre ayant été démolie quand on eut la malencontreuse idée de diminuer la hauteur des tours. Ces salles servaient de corps de garde; elles avaient chacune une chambre pour l'officier, et leurs cabinets d'aisances se voient encore à l'entrée des couloirs qui conduisent sur la plate-forme. Avant la Révolution, la première enceinte qu'on nommait l'avant cour, était couverte de maisons particulières, et il v a quelques années, on y voyait encore la maison qu'habitait Richelieu quand Louis XIII venait à Château-Thierry; mais au temps de sa splendeur féodale, il n'y avait que des logements et des magasins. Tout près de la porte se trouve l'entrée de souterrains qui n'ont aucune importance au point de vus stratégique. La seconde enceinte était séparée de la première par un large fossé que l'on traversait sur un pont de deux arches, sur la tête duquel venaient s'appuyer deux tourelles qui formaient l'entrée de ce second fort. Cette partie du château est la plus considérable et la plus ancienne. Les tourelles et le pont ont disparu; il ne reste plus que la base d'un donjon qui, à en juger par les vues anciennes et par ce que nous en avons sous les yeux, devait être formidable. Il se nommait donjon ou tour Saint-Thibault. Nous ne pouvons nous empêcher de voir dans ce curieux édifice un bel et rare échantillon de construction mérovingienne. Auprès du donjon s'élevait la chapelle Saint-Thibault, fondée par Thibault le Grand et qui aura sans doute donné son nom au donjon, lors des réparations que ce prince a pu y faire. L'église du château avait une crypte ou église souterraine où furent déposées les reliques de Saint-Cénéric et plus tard celles de Saint-Thibault, quand la chapelle fut démolie. A la suite de l'église étaient le presbytère, le palais du prince et les logements pour les troupes et les gens de service; toutes les constructions se trouvaient au Sud. Le second fort renfermait en outre deux jets d'eau, un puits appelé le Puits de l'Abîme, un abreuvoir et une citerne. La Prison du Roi est la tour qui forme l'encoignure de la pointe occidentale. Non loin de cette tour, du côté Sud, est la Tour Bouillon et la Tour Rouge. Auprès du donjon Saint-Thibault, on a découvert l'entrée d'un souterrain ou, pour parler plus exactement, de plusieurs souterrains assez curieux et qui pourraient peut-être donner raison à l'antique tradition qui voudrait qu'un souterrain partant du château pour descendre sous la Marne, vînt sortir à Nogentel. Comme le château peut passer pour un des plus curieux de la contrée, par son étendue qui était considérable et par les souvenirs qui s'y rattachent, il est fâcheux qu'après la Révolution on n'ait pas songé à en conserver les ruines au lieu de les détruire comme on l'a fait; il renfermait encore des débris fort curieux et on pouvait alors se faire une idée des constructions qui le couvraient. 

Éléments protégés MH: les ruines du château ainsi que la butte sur laquelle elles sont situées : classement par arrêté du 2 août 1932. 

château de Château-Thierry 02400 Château-Thierry 

Téléphone : 03 23 84 86 86

   

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